Lorsque l’employeur envisage la modification d’un élément essentiel du contrat de travail pour l’un des motifs économiques
énoncés à l’article L. 1233-3 du code du travail, il doit appliquer les modalités fixées par l’article L. 1222-6 du code du travail : l’employeur « en fait la proposition au salarié par lettre recommandée avec avis de réception. La lettre de notification informe le salarié qu’il dispose d’un mois à compter de sa réception pour faire connaître son refus. A défaut de réponse dans le délai d’un mois, le salarié est réputé avoir accepté la modification proposée ».
REMARQUE : rappelons que l’article L. 1233-3 du code du travail précité précise que « constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail ». En l’absence, dans le code de travail, de précisions sur le contenu de la proposition de modification faite pas l’employeur, la chambre sociale de la Cour de cassation, dans trois arrêts du 8 novembre 2023, insiste bien sur l’importance
de la précision de la proposition.
La proposition doit permettre de se positionner « en mesurant les conséquences de son choix »
Dans la première affaire (◆ Cass. soc., 8 nov. 2023, no 22- 10.350), la fermeture du centre optique où exerçait une salariée ayant été décidée, une modification du contrat de travail par transfert du lieu de travail lui a été proposée. A la suite de son refus l’employeur l’a licenciée pour motif
économique, licenciement que la salariée a contesté. En effet, la proposition de modification ne mentionnait pas la date d’affectation définitive dans le nouveau centre optique et ne précisait pas le ou les lieux temporaires d’affectation de la salariée entre-temps si elle acceptait la modification,
indiquant juste qu’ils se situeraient dans les Landes. Elle soutenait donc que la proposition n’était ni sérieuse ni loyale, et ce d’autant plus qu’elle avait deux jeunes enfants à charge : l’employeur aurait donc « proposer un lieu d’affectation aléatoire incompatible avec sa vie de famille
afin de la décourager ». Contrairement à la cour d’appel, la Cour de cassation a fait
droit à la demande de la salariée. Elle déduit de l’article L. 1222-6 du code du travail précité que l’employeur « est tenu de l’informer de ses nouvelles conditions d’emploi afin de lui permettre de prendre position sur l’offre qui lui est faite en mesurant les conséquences de son choix. A
défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse ».
Faute de date d’affectation définitive et de lieux temporaires d’affectation, la Cour de cassation estime en l’espèce que la proposition de modification du contrat n’était pas suffisamment précise pour permettre à l’intéressée de mesurer ces conséquences ; le licenciement ne
pouvait être vu comme fondé sur une cause réelle et sérieuse. Peu important d’ailleurs que la salariée ait
demandé ou non des précisions additionnelles suite à la proposition. Le motif économique à l’origine de la proposition de modification doit clairement ressortir.
Ce n’est donc pas tant la mention de l’article L. 1222-6 dans la proposition qui compte que celle d’un véritable motif économique expliquant la modification proposée.